Épisode de manie dans les troubles bipolaires : Qu’est-ce que c’est?

Troubles bipolaires : qu'est-ce qu'un épisode de manie ?

Test : Pourriez-vous être atteint d’un trouble bipolaire?

Il est estimé que près de 40 % des personnes diagnostiquées comme dépressives pourraient en réalité être atteintes d’un trouble bipolaire qui n’a pas été identifié.

On distingue deux formes de troubles bipolaires :

– Le trouble bipolaire de type 1 se manifeste par des épisodes de manie, avec ou sans épisodes de dépression ;
– Le trouble bipolaire de type 2 se caractérise par des épisodes d’hypomanie (moins intenses que les épisodes de manie) qui alternent avec des épisodes de dépression majeure.

L’épisode de manie

Les critères diagnostiques du DSM-5, qui est le manuel de référence pour les diagnostics en santé mentale, permettent de caractériser un épisode de manie, typique du trouble bipolaire de type 1.

Critère A : Il s’agit d’une période clairement définie durant laquelle l’humeur est anormalement et constamment élevée, expansive ou irritable, accompagnée d’une augmentation anormale et constante de l’activité ou de l’énergie orientée vers un but. Cette période doit durer la plupart du temps, presque tous les jours, pendant au moins une semaine (ou moins si une hospitalisation est nécessaire).

L’humeur est souvent décrite comme euphorique, excessivement joyeuse, élevée, ou comme une sensation de se sentir « au sommet du monde ». Dans certains cas, l’humeur est tellement contagieuse qu’elle est perçue comme excessive, caractérisée par un enthousiasme débordant et imprudent pour les relations personnelles ou professionnelles. Souvent, l’humeur dominante est irritable plutôt qu’élevée, en particulier lorsque les souhaits de la personne maniaque sont contrariés. Des changements rapides d’humeur sur de courtes périodes peuvent se produire et sont qualifiés de labilité (c’est-à-dire qu’il y a alternance entre euphorie, dysphorie et irritabilité).

Pendant l’épisode maniaque, la personne peut se lancer dans plusieurs nouveaux projets en parallèle. Rien ne semble hors de portée pour les personnes maniaques qui se lancent dans des projets malgré leur manque de compétences dans le domaine concerné. L’augmentation du niveau d’activité peut se manifester à des heures inhabituelles.

Critère B : Pendant cette période de perturbation de l’humeur et d’augmentation de l’énergie ou de l’activité, au moins trois des symptômes suivants (quatre si l’humeur est seulement irritable) sont présents avec une intensité significative et représentent un changement notable par rapport au comportement habituel :

1. Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur.
2. Réduction du besoin de sommeil (par exemple, la personne se sent reposée après seulement trois heures de sommeil).
3. Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir constant de parler.
4. Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent.
5. Distractibilité (c’est-à-dire que l’attention est trop facilement attirée par des stimuli externes sans importance ou non pertinents) rapportée ou observée.
6. Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice (c’est-à-dire une activité sans objectif, non orientée vers un but).
7. Engagement excessif dans des activités à potentiel élevé de conséquences dommageables (par exemple, la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles irresponsables ou des investissements commerciaux déraisonnables).

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L’estime de soi exagérée peut aller d’une confiance en soi aveugle à une grandiosité marquée, pouvant atteindre des proportions délirantes. Malgré l’absence de toute expérience ou talent particulier, la personne peut se lancer dans des tâches complexes telles que l’écriture d’un roman ou l’annonce d’inventions improbables. Des idées délirantes mégalomaniaques (par exemple, avoir des relations privilégiées avec une personne célèbre) sont communes.

L’une des caractéristiques les plus courantes est une réduction du besoin de sommeil. Au cours de la manie, la personne peut dormir peu, voire pas du tout, ou peut se réveiller plusieurs heures plus tôt que d’habitude, et se sentir reposée et pleine d’énergie. Lorsque la perturbation du sommeil est grave, la personne peut passer des jours sans dormir, sans se sentir fatiguée. Souvent, une réduction du besoin de sommeil annonce le début d’un épisode maniaque.

Le discours peut être rapide, logorrhéique, bruyant et difficile à interrompre. Les personnes peuvent parler sans arrêt, peu soucieuses des autres ni animées par le désir de communiquer, elles parlent souvent de manière intrusive ou sans se soucier de la pertinence de leurs propos. Elles peuvent s’exprimer avec théâtralité et une gestuelle excessive. Si l’humeur est plus irritable qu’expansive, le discours peut être marqué par des plaintes, des commentaires hostiles ou des tirades colériques, surtout lorsque l’on tente de l’interrompre.

Souvent, les pensées s’emballent à un rythme plus rapide que ce qui peut être exprimé par la parole. Fréquemment, la fuite des idées s’exprime par un flot accéléré de paroles presque ininterrompues, avec des changements brusques d’un sujet à l’autre. Lorsque la fuite des idées est importante, le discours peut devenir désorganisé, incohérent et source d’anxiété pour la personne. Parfois, les pensées se bousculent tellement qu’il devient difficile pour la personne de s’exprimer.

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La distractibilité se manifeste par une incapacité à censurer les stimuli externes de moindre importance (par exemple, la tenue vestimentaire de l’interlocuteur, des bruits ou des conversations de fond, l’aménagement de la salle) et empêche souvent les patients maniaques de tenir une conversation rationnelle ou de suivre des consignes.

L’hyperactivité orientée vers un but consiste souvent en des projets excessifs et un engagement dans de multiples activités. Une augmentation des comportements sexuels est souvent présente. La sociabilité est fréquemment accrue (par exemple, en renouant avec d’anciennes relations ou en téléphonant à des amis ou même à des étrangers) sans prise en compte de la nature intrusive, dominatrice et exigeante de ces interactions. Ils présentent souvent une agitation psychomotrice, une fébrilité s’exprimant par une activité stérile, en faisant les cent pas ou en tenant plusieurs conversations à la fois.

L’humeur expansive, un optimisme excessif, des idées de grandeur et le manque de discernement mènent souvent à des implications imprudentes dans des activités telles que des dépenses effrénées, une conduite dangereuse, des investissements commerciaux déraisonnables, et ce même si ces activités sont susceptibles d’avoir des conséquences catastrophiques.

Les deux critères A et B peuvent être accompagnés de symptômes du pôle opposé (c’est-à-dire dépressif). On parle alors d’un épisode de manie avec caractéristiques mixtes.

Critère C : La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération significative du fonctionnement professionnel ou des activités sociales, ou pour nécessiter une hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour la personne ou pour autrui (par exemple, des pertes financières, des activités illégales, une perte d’emploi, des comportements préjudiciables), ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.

Critère D : L’épisode n’est pas attribuable aux effets physiologiques d’une substance (par exemple, substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou à une autre affection médicale.

Il convient de noter qu’un épisode maniaque complet qui se produit lors d’un traitement antidépresseur (par exemple, un médicament, une sismothérapie) mais qui persiste et remplit les critères complets d’un épisode au-delà de l’effet physiologique simple de ce traitement doit être considéré comme un épisode maniaque et conduire, par conséquent, à un diagnostic de trouble bipolaire I.

Autres caractéristiques associées en faveur du diagnostic : Souvent, les personnes qui vivent un épisode maniaque ne se perçoivent pas comme étant malades et rejettent fermement toute tentative de traitement. Elles peuvent changer leur style vestimentaire, de maquillage ou d’apparence physique ou adopter un style extravagant. Certaines personnes décrivent une perception plus aiguë des odeurs, des sons ou des stimuli visuels. Le jeu pathologique ou les comportements antisociaux peuvent accompagner un état maniaque. Certaines personnes peuvent devenir hostiles et physiquement menaçantes envers les autres, et en présence d’idées délirantes, devenir physiquement agressives.

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L’humeur peut changer très rapidement vers la colère ou des affects tristes. Les symptômes dépressifs peuvent survenir pendant quelques instants, quelques heures ou plus rarement quelques jours (caractéristiques mixtes).

La manie liée à des substances ou des médicaments

Les symptômes ou syndromes maniaques qui sont attribuables aux effets physiologiques d’un abus d’une substance donnant lieu à abus (comme la cocaïne ou les amphétamines), aux effets secondaires des médicaments ou des traitements (comme les stéroïdes, la L-dopa, les antidépresseurs, les stimulants) ou à toute autre pathologie médicale ne doivent pas être diagnostiqués comme un trouble bipolaire.

L’hypomanie

Dans l’hypomanie, les critères A et B de la manie sont rencontrés, mais la gravité de l’épisode n’est pas suffisante pour provoquer une altération significative du fonctionnement professionnel ou social, ou pour nécessiter une hospitalisation. S’il existe des caractéristiques psychotiques, l’épisode est, par définition, maniaque. Le trouble bipolaire 2 est caractérisé par au moins un épisode de dépression majeure et un épisode d’hypomanie. (En présence d’un épisode de manie, il s’agit d’un trouble bipolaire de type 1.)

La cyclothymie

La caractéristique principale du trouble cyclothymique est une perturbation chronique et fluctuante de l’humeur qui implique des périodes de symptômes d’humeur élevée et des périodes de symptômes dépressifs qui ne sont pas assez sévères pour rencontrer les critères diagnostiques des épisodes d’hypomanie et de dépression majeure caractéristiques du trouble bipolaire de type 2.

– Trouble bipolaire : la psychothérapie comportementale dialectique pour aider à gérer les fluctuations d’humeur
– Troubles bipolaires de types 1 et 2 : symptômes, critères diagnostiques
– TEST : Pourriez-vous être atteint d’un trouble bipolaire?

Pour plus d’informations sur les troubles bipolaires, voyez les liens plus bas.

(1) DSM-5, 5e édition du « Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders », American Psychiatric Association, 2013. Traduction française : Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, Masson, 2015. La première édition du DSM a été publiée en 1952.

Thierry Gaillard avec sources : DSM-5, Fondation Fondamental.
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Thierry Gailard

Auteur

Thierry Gailard, avec son riche parcours en tant que psychologue clinicien, se présente aujourd'hui comme une voix authentique et éclairée dans le monde de la psychologie sur notre site. Fort de plusieurs années d'expérience en cabinet, Thierry a consacré sa carrière à comprendre et à soigner l'esprit humain. Aujourd'hui retraité de la pratique clinique, il se consacre à partager ses connaissances et son expertise à travers des articles accessibles et instructifs. Ses écrits s'adressent aussi bien aux novices qu'aux connaisseurs, offrant des perspectives uniques et des explications claires sur divers sujets psychologiques. De la psychologie du développement à la neuropsychologie, en passant par la psychologie sociale, Thierry Gailard aborde une multitude de thèmes avec une approche pédagogique et empathique. Son objectif est de rendre la psychologie compréhensible et utile pour tous ceux qui cherchent à mieux comprendre les processus mentaux, les émotions et le comportement humain.

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