Comprendre la dépression et son impact sur la cognition
La dépression, qu’elle soit de type majeure ou bipolaire, est souvent caractérisée par un sentiment de tristesse et une perte de plaisir qui ne s’améliore pas même en présence d’événements positifs. Cette définition nous est donnée par les chercheurs de l’Inserm.
En outre, les personnes souffrant de dépression ont souvent des biais cognitifs, comme des pensées négatives persistantes à propos d’elles-mêmes, du monde qui les entoure et de leur futur. C’est ce que le psychiatre américain Aaron T. Beck a appelé la « triade cognitive négative ». Ces idées noires contribuent à alimenter la dépression.
Ces pensées négatives restent présentes même lorsqu’on présente à la personne déprimée des informations positives. En effet, la vision excessivement sombre qu’elles ont de l’avenir les rend moins sensibles aux informations qui pourraient contredire leurs croyances négatives. Ce pessimisme généralisé contraste fortement avec l’optimisme parfois irréaliste que l’on retrouve chez les personnes en bonne santé.
La kétamine comme traitement de la dépression
« Environ un tiers des personnes souffrant de dépression ne répondent pas aux antidépresseurs les plus couramment prescrits, ce qui conduit au diagnostic de dépression résistante au traitement. » La kétamine, un anesthésique couramment utilisé, a montré un effet sur la dépression résistante. Alors que les traitements antidépresseurs classiques prennent du temps avant d’agir (en moyenne trois semaines), la kétamine provoque un effet antidépresseur rapide, seulement quelques heures après son administration.
Hugo Bottemanne de l’Université Sorbonne (Inserm) et ses collègues ont mené une étude pour évaluer si ces effets précoces de la kétamine ont un impact sur le biais de croyances. Ils ont recruté 26 personnes souffrant de dépression majeure ou de dépression bipolaire non améliorée par au moins deux antidépresseurs. Ces personnes ont été comparées à un groupe de trente volontaires en bonne santé.
Les participants de l’étude ont dû estimer la probabilité d’occurrence dans leur vie de 40 événements « négatifs » (par exemple, avoir un accident de voiture, être atteint d’un cancer, ou perdre son portefeuille). Ils ont ensuite été informés des risques réels de leur survenue dans la population générale.
Effets de la kétamine sur la cognition
Les chercheurs ont analysé comment les croyances des participants évoluaient face aux informations factuelles et positives qu’ils avaient reçues. Les participants en bonne santé avaient tendance à modifier davantage leurs croyances initiales que ceux souffrant de dépression.
Ces derniers ont reçu trois administrations de kétamine à une posologie subanesthésique en une semaine. Seulement quatre heures après la première administration, leur capacité à mettre à jour leurs croyances face à des informations positives était augmentée. Ils devenaient moins sensibles aux informations négatives, et retrouvaient une capacité à mettre à jour leurs connaissances comparable à celle des participants témoins.
L’amélioration des symptômes dépressifs après le traitement par kétamine était liée à ces changements dans la mise à jour des croyances, suggérant qu’il y aurait un lien entre l’amélioration clinique et les modifications de ce mécanisme cognitif. « Plus la capacité de mise à jour des croyances des patients était augmentée, plus l’amélioration des symptômes était importante », expliquent les chercheurs.
En résumé, dans cette étude, les patients atteints de dépression résistante aux antidépresseurs ont vu une diminution significative de leurs symptômes et sont devenus plus réceptifs aux expériences « positives » après une semaine de traitement à la kétamine.
L’étude a été menée par Orphee Morlaas, Anne Claret, Tali Sharot, Philippe Fossati, Liane Schmidt. Les sources utilisées sont Inserm et JAMA Psychiatry.
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