Sevrage des antidépresseurs : Symptômes selon 20 témoignages analysés par chercheurs

Les symptômes du sevrage des antidépresseurs selon 20 témoignages analysés par des chercheurs

Une analyse systématique citée par les auteurs a révélé que 46% des personnes en processus de sevrage décrivaient leurs symptômes comme très graves, ces symptômes durant souvent plus de deux semaines, et même plusieurs mois dans certains cas.

Les inquiétudes liées à ces effets de sevrage et la peur de la rechute poussent souvent les patients à continuer leur traitement antidépresseur même après la disparition des symptômes de dépression.

Une enquête menée auprès des généralistes britanniques, aussi mentionnée par les auteurs, a mis en évidence des lacunes dans leur connaissance du sevrage. Il est notamment difficile pour eux de différencier les symptômes de sevrage des premiers signes d’une rechute dépressive.

Les études montrent que le sevrage peut entraîner diverses expériences, incluant des changements physiques et émotionnels. Cependant, les recherches menées jusqu’à aujourd’hui se sont principalement concentrées sur les symptômes physiques.

Afin de mieux comprendre l’impact du sevrage sur d’autres aspects de la vie comme l’humeur, les relations sociales et les processus cognitifs, Raqeeb Mahmood et ses collègues du Département de psychologie de l’Université de Bath et de l’École de médecine de l’Université de Bristol (Royaume-Uni) ont réalisé des entretiens détaillés avec 20 personnes ayant essayé d’arrêter leur traitement antidépresseur durant l’année précédente.

Ces entretiens ont révélé cinq thèmes principaux.

  1. Impact émotionnel et cognitif

    Les participants ont exprimé que la fin de l’apathie émotionnelle provoquée par les antidépresseurs était parfois difficile à gérer. Ils se sentaient souvent submergés par leurs émotions.

    Cependant, ils appréciaient aussi de pouvoir ressentir à nouveau des émotions de manière normale.

    Quelques participants ont également ressenti une levée de l’inhibition cognitive (des pensées et des souvenirs qui semblaient avoir été supprimés réapparaissaient).

    Les pensées négatives et les difficultés de concentration étaient communes.

  2. Impact relationnel et social

    Plus de la moitié des participants ont estimé que le sevrage avait un impact négatif sur leurs relations intimes et sociales. Souvent, c’étaient les proches qui devaient gérer les difficultés d’expression des émotions des participants. Certains avaient l’impression que leur partenaire ou leur famille souhaitaient qu’ils reprennent leur médication.

    C’est un aspect important du sevrage, soulignent les chercheurs, car la famille est souvent une source de soutien essentielle. S’y préparer peut donc aider le patient et sa famille à mieux vivre le processus de sevrage.

    Certains participants ont indiqué que les situations sociales leur semblaient plus difficiles et ressenties comme une contrainte. Certains avaient tendance à s’isoler davantage.

  3. Impact sur la santé physique

    Tous les participants ont déclaré avoir ressenti des effets secondaires physiques pendant le sevrage, notamment :

    • de la fatigue ;
    • des nausées et des vomissements ;
    • des troubles du sommeil (cauchemars, transpiration nocturne et rêves intenses) ;
    • des diarrhées ;
    • de l’akathisie (incapacité à rester immobile) ;
    • des sensations de décharges électriques ou de vibrations cérébrales ;
    • des acouphènes ;
    • des maux de tête ;
    • des vertiges ;
    • des douleurs articulaires.

    Les effets secondaires physiques étaient perçus comme ayant un impact sur la qualité de vie générale, mais aussi sur les performances scolaires ou professionnelles et la vie sociale.

    Des impacts physiques positifs

    Certains participants ont rapporté des impacts physiques positifs. Ils affirmaient se sentir plus en forme, en meilleure santé, avoir perdu du poids et avoir une meilleure régulation de leur appétit.

    La pratique d’exercices était mentionnée par certains comme une stratégie d’adaptation lors du sevrage.

  4. Soutien des proches, des amis et des médecins

    Environ la moitié des participants ont déclaré avoir eu des difficultés à communiquer sur les défis du sevrage avec leur famille et leurs amis, ce qui a parfois conduit à des conflits. Ceux qui ont décrit avoir reçu un bon soutien ont mentionné que cela était peut-être dû au fait que les membres de leur famille avaient des connaissances en santé mentale ou avaient vécu des expériences similaires.

    « Certains symptômes étaient si graves que la famille et les amis de la personne qui arrêtait son traitement l’ont encouragée à le reprendre ».

    Les participants ont estimé que, bien que les médecins généralistes aient été globalement « sympathiques et encourageants », ils n’ont eu qu’une implication minimale pendant le sevrage et qu’il semblait y avoir un manque de sensibilisation aux effets du sevrage et un nombre insuffisant de visites de suivi.

    Ils auraient aimé que les médecins généralistes fournissent plus de conseils sur la gestion des effets secondaires. Ils avaient souvent le sentiment d’être laissés à eux-mêmes et que peu de ressources d’auto-assistance étaient disponibles auprès de leurs prestataires de soins de santé.

  5. Le moment du sevrage

    Il est important que la diminution du traitement soit progressive pour que le sevrage soit gérable. Certains participants ont souligné l’importance de planifier les tentatives de sevrage pendant des périodes moins stressantes de leur vie.

    Des participants ont souligné l’importance d’un sevrage progressif, mais aussi flexible et adapté à chaque individu. Un participant a par exemple exprimé : « Je dois en quelque sorte écouter mon corps. J’ai ajusté ma dose en conséquence, je ne sais pas si c’était une bonne idée, mais cela m’a permis de passer au travers. »

« L’expérience du sevrage a un impact significatif sur le bien-être des individus. Les participants ont souligné que le sevrage ne se limite pas aux effets secondaires physiques, mais qu’il affecte également leur fonctionnement émotionnel, cognitif et social », concluent les chercheurs.

(1) Vuokko Wallac, Nicola Wiles, David Kessler, Katherine S. Button, Graeme Fairchild.

(2) Les antidépresseurs utilisés étaient de la classe des inhibiteurs sélectifs du recapture de la sérotonine (ISRS) qui est la classe la plus souvent prescrite.

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Thierry Gailard

Auteur

Thierry Gailard, avec son riche parcours en tant que psychologue clinicien, se présente aujourd'hui comme une voix authentique et éclairée dans le monde de la psychologie sur notre site. Fort de plusieurs années d'expérience en cabinet, Thierry a consacré sa carrière à comprendre et à soigner l'esprit humain. Aujourd'hui retraité de la pratique clinique, il se consacre à partager ses connaissances et son expertise à travers des articles accessibles et instructifs. Ses écrits s'adressent aussi bien aux novices qu'aux connaisseurs, offrant des perspectives uniques et des explications claires sur divers sujets psychologiques. De la psychologie du développement à la neuropsychologie, en passant par la psychologie sociale, Thierry Gailard aborde une multitude de thèmes avec une approche pédagogique et empathique. Son objectif est de rendre la psychologie compréhensible et utile pour tous ceux qui cherchent à mieux comprendre les processus mentaux, les émotions et le comportement humain.

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