L’interconnexion, la richesse et les innovations des grandes villes : bénéfiques seulement pour une élite

Il semble que plus une ville est grande, plus elle génère des interconnexions, des richesses et des innovations par habitant. Cependant, ce qui est généralement vrai pour les populations urbaines en moyenne ne l’est pas nécessairement pour chaque résident individuel.

Les performances économiques plus élevées des grandes villes reposent principalement sur les résultats extraordinaires de quelques personnes qui prospèrent, selon l’équipe de chercheurs à l’origine de cette étude. En négligeant cette dépendance, les responsables politiques risquent de surévaluer la stabilité de la croissance urbaine. Cela est particulièrement vrai compte tenu de la grande mobilité spatiale des élites urbaines qui se dirigent vers les lieux où l’argent est concentré, comme l’explique Marc Keuschnigg, professeur de sociologie aux universités de Linköping en Suède et de Leipzig en Allemagne.

Keuschnigg et ses collaborateurs, Martin Arvidsson et Niclas Lovsjö, ont examiné des données géocodées sur les interactions sociales et la production économique en Suède, en Russie et aux États-Unis. Ils ont observé 1,4 million de travailleurs suédois sur une période de temps et ont constaté que ceux qui avaient initialement réussi dans les grandes villes prospéraient davantage que ceux qui avaient réussi dans les petites villes. Cependant, les trajectoires salariales des résidents typiques des petites et grandes villes étaient presque identiques.

Il en résulte que ceux qui avaient initialement réussi dans les grandes villes se sont progressivement éloignés de l’habitant moyen de leur propre ville, créant ainsi une inégalité au sein des grandes villes. De la même manière, les individus qui ont eu le plus de succès dans les petites villes ont créé une inégalité entre les villes.

La productivité d’une personne dépend des environnements sociaux locaux dans lesquels elle évolue. Du fait de la plus grande diversité dans les grandes villes, les personnes qualifiées et spécialisées ont davantage de chances de rencontrer d’autres individus dont les compétences complètent les leurs. Par conséquent, les niveaux de productivité et les opportunités d’apprentissage sont plus élevés dans les grandes villes.

Cependant, tout le monde n’a pas accès aux environnements sociaux productifs que proposent les grandes villes. Les bénéfices variés de ces contextes s’accumulent au fil du temps, ce qui engendre de grandes inégalités.

L’étude révèle également que les personnes les mieux payées ont plus de chances de quitter les petites villes pour les grandes villes. Ces individus surperformants ont tendance à migrer vers les grandes villes. Ce mouvement disproportionné des personnes les plus performantes des petites villes déclenche un processus de renforcement qui épuise le potentiel des régions moins peuplées tout en enrichissant les grandes villes.

Les plus grandes villes bourdonnent d’activité car elles attirent les personnes les plus innovantes, les plus sociables et les plus compétentes. Ces individus contribuent de manière disproportionnée à la production des villes, un processus d' »enrichissement » qui confère un avantage cumulatif aux plus grandes villes.

En ce qui concerne les inégalités urbaines, l’étude souligne l’exclusion partielle de la majorité des citadins des avantages socio-économiques des villes en expansion. Leur mode de vie, différent de celui de l’élite urbaine, profite moins de la situation géographique. En prenant en compte le coût de la vie dans les grandes villes, de nombreux habitants sont en réalité moins bien lotis que des personnes similaires vivant dans des villes plus petites.

Source : Linköping University, Nature Human Behavior.
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